
Dans le tiroir à secrets d’un petit secrétaire, Louise de R. dissimule sa correspondance privée. Deux siècles plus tard, Julien-Henri de R., son descendant, exhume ces précieux témoignages du passé.
Dans ce double récit, l’un composé des lettres échangées entre madame de R. et son amie et l’autre des incises et commentaires de Julien-Henri, se déploient et s’entremêlent deux romances, l’une tragique et passionnelle, l’autre douce et attendrissante.
Autrice : Cécile Meynard
Prix : 12,90 €
ISBN :
Date de parution : 29/01/2026
Pages : 192
Format : 148×210 mm
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Lire un extrait…
Lettre 1 : Mademoiselle de B. à Laurence de V. (brouillon).
3 juillet 1817
Ma très chère cousine et amie,
Je suis si triste de vous quitter et de vous laisser seule en ce couvent du Sacré-Cœur où nous fûmes, somme toute, bien heureuses, que je ne puis résister au plaisir de vous écrire malgré les terribles cahots de la voiture qui m’emmène loin de vous. Et dans le même temps je suis si émue, et même – ne vous moquez pas – joyeuse du sort qui m’attend à Verr. ! Pensez donc, ma bonne tante qui m’annonce il n’y a pas de cela six mois, qu’elle fait de moi son héritière. Et au même moment, ce monsieur de R. qui me fait une demande en mariage ! La mère supérieure m’en a fait les plus grandes louanges. Il est propriétaire terrien, il pense bien, brigue la mairie de la ville avec les plus grandes chances de l’obtenir. Un peu âgé pour moi il est vrai mais rien qui ne soit excessif. Et ne nous a-t-on pas appris au couvent à nous satisfaire de notre situation d’épouse, et j’espère bientôt, de mère, dans la foi de notre seigneur Jésus-Christ ? Ce qui me réjouit le plus, c’est, sans aucun doute, qu’il possède une charmante propriété à la campagne, du joli nom de V***y, et ce séjour me semble pouvoir convenir parfaitement à ma nature un peu sauvage – que vous m’avez si souvent et en vain reprochée. En bref, mon amie, me voici, sinon au comble de la félicité, du moins heureuse et confiante en l’avenir, ce qui me semble bien plus raisonnable.
Il me reste à espérer, ma bonne Laurence, que vous trouviez bien vite à votre tour un mari et que nous ayons le bonheur de nous revoir.
Votre, pour toujours.
Louise de B. qui sous peu, signera Louise de R.
Je continue mes investigations dans cette correspondance, qui s’avère à la fois plus partielle que je ne le pensais – de nombreuses lettres de la destinataire ne figurant pas dans la liasse, et à l’inverse, plusieurs brouillons n’ayant apparemment pas été conservés – et plus complète, avec la présence entre les brouillons de lettres de mon ancêtre de quelques missives ou billets rédigés par d’autres correspondants, voire de fragments de textes qui rendent parfois le déchiffrement complexe, mais non moins émouvant. Nous sommes par moments contraints d’imaginer l’échange, de lire entre les lignes, ou même parfois de décrypter les mots sous les ratures, qui semblent de plus en plus nombreuses au fil du temps. Je n’en suis qu’au début du tri et du déchiffrage, mais voici donc, comme promis, la deuxième lettre de madame de R. à son amie.
J. H. de R.
Lettre 2 : Louise de R. à mademoiselle de V.
2 avril 1818
Ma bonne amie,
Je viens d’apprendre à l’instant par votre missive votre prochain mariage avec monsieur D. et je m’en réjouis, sincèrement pour vous car il vous donnera une belle situation même s’il n’est point noble, et égoïstement pour moi car nous pourrons enfin nous revoir, à Besançon où vous résiderez sans doute ou dans ma charmante résidence de V***y où je me plais tant. J’espère que vous serez très heureuse de ce mariage et qu’il vous apportera toutes les satisfactions que vous en attendez. En réalité, connaissant votre caractère si raisonnable, je n’en doute guère. Pour moi, que vous avez si souvent traitée de fille folle et fantasque, je ne suis certes pas emportée par une passion dévorante – et c’est sans doute tant mieux. Je m’accommode aisément de cette vie tranquille, au milieu de mes fleurs et de mes poussins et ne m’ennuie jamais. […] Enfin, j’ai gardé le plus merveilleux pour la fin, ma chère amie : je serai en effet bientôt mère et cela me réjouit le cœur d’une façon que vous ne sauriez imaginer. Même si j’appréhende au plus haut point ce terrible moment, il me tarde de donner le jour à ce petit être que j’attends depuis de si longs mois.
Ma chère, donnez vite de vos nouvelles. Il me tarde tant de vous lire ! Vous me raconterez votre cérémonie de mariage, n’est-ce pas ? je veux tout savoir !
Votre, toujours,
Louise de R.
Lettre 3 : Madame D. à madame Louise de R.
12 juillet 1818
Ma bien chère Louise,
Je me dois de vous gronder doublement. D’abord, dans votre dernière lettre, vous ne me racontez rien de ce jeune homme qui vous poursuit de ses assiduités. Ne rougissez pas, je sais lire entre les lignes et je suis sûre qu’il vous a fait des propositions : comment lui avez-vous répondu ? Racontez, racontez, ma chère, je vous en supplie. Avec votre esprit rieur, espiègle comme vous l’êtes malgré votre bienveillance naturelle, ce serait un bien joli petit récit à lire. Ne m’en privez point, de grâce.
Ensuite, je dois vous gronder d’être bien trop complaisante avec votre malotru de mari. Vous me dites qu’il est bien mieux que les autres hommes de votre entourage, bien plus aimable. Seigneur, que doivent-ils être alors ? Je suis sincèrement désolée pour vous, ma douce amie, même si vous-même ne vous plaindrez jamais, je le sais bien. Il vous a donc grondée parce que vous aviez pillé par adorable fantaisie le mimosa de la cour d’honneur pour vous faire une parure ? mais, ma chère, cet homme n’a pas d’yeux pour voir ?! Avec vos yeux bleus si vifs, vos beaux cheveux blonds, et ces fleurettes jaune d’or tressées dans vos boucles et s’emmêlant avec les rubans de votre robe blanche, vous deviez être à croquer, une image vivante de la déesse Flore… Quel butor, quel faquin, quel idiot surtout ! Je suis indignée car vous n’êtes pour lui qu’une propriété, une belle pièce de son mobilier, rien de plus. Pour moi, qui n’ai pas votre fantaisie naturelle ni de mimosa à scalper comme le ferait un Iroquois, la vie est bien plus tranquille, pour ne pas dire monotone. Après une cérémonie plus qu’intime lors de laquelle monsieur D. m’épousa en présence de nos deux témoins choisis par lui, il m’installa dans une confortable demeure bourgeoise de Besançon et voilà à peu près tout ce que j’ai à en dire. J’ai la chance d’avoir un vieux mari, qui s’intéresse bien plus à ses écritures qu’à ma tournure et à mon minois, mais cela me convient tout à fait car ce que vous m’avez laissé entendre des terribles douleurs de l’enfantement, et des prétendues joies de la maternité ne m’a guère séduite… Comment, vous n’avez point envoyé l’enfant à la campagne, chez une bonne nourrice, pour ne pas être dérangée par ses cris ? Cela ne peut se concevoir. Je m’imagine quant à moi aisément en jeune veuve indépendante administrant paisiblement son domaine. Vous ai-je choquée par mon cynisme ? je suis sûre que vous souriez malgré votre air sévère… C’est aussi pour cela que je vous aime.
Votre, à jamais,
Laurence D.




